Le projet de loi sur le renseignement prépare-t-il une surveillance de masse ? Le Sénat vote ce texte le 9 juin sans que la question ne soit tranchée. Pour tenter de clarifier le débat, essayons de définir précisément ces termes. Qu’appelle-t-on surveillance exactement ? À partir de quand une surveillance devient-elle massive ? […]
Cependant, même dans l’hypothèse où le Conseil constitutionnel permettrait de circonscrire cette définition aux données de connexion ou aux données dites techniques (ou métadonnées c’est-à-dire tout sauf les contenus eux-mêmes), on sait aujourd’hui que ces métadonnées sont parfois plus intrusives que les données elles-mêmes. Les métadonnées sur Internet permettent, par exemple, d’établir le graphe social d’une personne ou encore d’identifier ses centres d’intérêt ou son orientation politique à partir des adresses des sites qu’elle visite. Elles sont d’ailleurs largement utilisées par les publicitaires pour catégoriser les internautes. Ces données ne sont donc pas anodines. […]
L’objectif du projet de loi, et plus précisément des fameuses « boîtes noires », est justement d’identifier des suspects à partir de « signaux faibles », par exemple de visites sur certains sites. Nous sommes donc clairement dans la surveillance de masse. De plus, si le but est de couvrir tout le territoire, une surveillance totale paraît inévitable. Pour reprendre l’exemple souvent mis en avant par les ministres défendant le projet de loi, comment circonscrire a priori une recherche si l’objectif est d’identifier tous les internautes qui se connectent à des sites mettant en ligne des vidéos de décapitation ? […]
http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/06/09/oui-la-loi-sur-le-renseignement-prepare-bien-une-surveillance-de-masse_4650358_3232.html