Paris, 25 février 2010 – Un document inquiétant relatif à Internet a été publié par la Présidence espagnole du Conseil de l’Union européenne. Tout en demandant aux États membres quelles sont leur pratiques en matière de filtrage d’activités illégales sur Internet, la Présidence fait l’amalgame entre la pédopornographie, les discours racistes et xénophobes et la contrefaçon d’œuvres soumises au droit d’auteur.
« Nobody expects the Spanish inquisition! »
Poursuivant sur cette inacceptable confusion des genres, le document va jusqu’à dire qu’ « Internet devient un instrument de régression sociale ». Une telle instrumentalisation des peurs dans le but d’imposer des politiques réactionnaires telles que le filtrage du Net n’est pas tolérable dans l’Union Européenne.
Ces questions (voir ci-dessous) sont clairement orientées pour justifier l’imposition du filtrage de l’Internet et son extension à de nouveaux domaines. Alors qu’elles sont inefficaces pour faire appliquer le droit, ces mesures dangereuses mettent en cause la structure décentralisée d’Internet et violent le principe de neutralité du Net. Elles ouvrent également la porte à la censure. En effet, appliquer les limites traditionnelles de la liberté d’expression au travers du filtrage du Net expose les utilisateurs d’Internet au risque de blocage collatéral de sites web (sur-blocage).
« Cette instrumentalisation réactionnaire des peurs par la Présidence espagnole n’est pas tolérable. Nos sociétés modernes doivent considérer Internet comme un espace public au service du progrès culturel, économique et social, pas comme un far-west dans lequel aucune règle ne s’applique. Les citoyens attachés à leurs libertés et à Internet sont menacés par ce projet sécuritaire visant à contrôler la sphère publique en réseau. Les citoyens européens, tout particulièrement en Espagne, doivent suivre l’exemple de l’initiative ‘Red Sosenible‘1http://red-sostenible.net/index.php/Comunicado et s’opposer à cette vision extrémiste et dangereuse », déclare Jérémie Zimmermann porte-parole et co-fondateur de La Quadrature du Net.
Questions posées par la Présidence espagnole aux États membres
1. Comment votre pays lutte-t-il contre la pédopornographie, les contenus racistes et xénophobes et les atteintes à la propriété intellectuelle sur Internet ? Peut-on bloquer l’accès, dans votre pays, aux pages Internet comportant ce type de contenus?
2. Comment pensez-vous qu’il faudrait agir pour lutter contre ce type d’activités au niveau de l’Union européenne?
3. Comment pourrait-on agir contre ce type de contenus lorsqu’ils sont diffusés à partir de
serveurs situés dans des États non membres de l’Union européenne?
Afin d’être en accord avec les principes démocratiques de l’Union Européenne, les réposnes à ces questions devraient indiquer que:
- Les mesures de blocage et de filtrage sont inefficaces, puisqu’elles peuvent être facilement contournées. De plus, des études montrent qu’aucune méthode ne peut éviter le risque de sur-blocage, et donc que le filtrage empêche l’accès à des sites parfaitement légaux mettant ainsi en danger la liberté d’expression et de communication des utilisateurs d’Internet.
- Plutôt que le filtrage, la seule solution efficace dans la lutte contre le crime en ligne est de faire retirer les contenus des serveurs qui les hébergent2Voir à ce sujet l’annonce récente du gouvernement allemand: http://www.laquadrature.net/fr/loppsi-lallemagne-renonce-a-la-censure-du-net.
- Afin de garantir l’État de droit sur Internet, l’Union européenne doit refuser de contourner les procédures judiciaires. Seul un juge est en mesure de qualifier un contenu ou une activité d’illégal.