QSPTAG #309 — 7 juin 2024

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Pourquoi le blocage de TikTok est un précédent inquiétant

Lors des événements violents qui ont secoué la Kanaky-Nouvelle-Calédonie au mois de mai, le gouvernement avait décidé de bloquer sur ce territoire l’accès au réseau social TikTok, accusé d’être un moyen d’entretenir la révolte d’une partie de ses habitant·es. Pleinement conscients de la toxicité de ce réseau social comme de nombreux autres, nous avions pourtant attaqué la décision du gouvernement devant le Conseil d’État, en raison de son atteinte exceptionnelle au régime de l’État de droit et de la liberté d’expression, une première dans un pays démocratique de l’Union européenne.

Le Conseil d’État a rejeté notre demande, validant la légalité confuse invoquée par le gouvernement pour justifier son geste, flottant entre « état d’urgence » et « circonstances exceptionnelles », tout autant que la légèreté des preuves qu’il apportait pour appuyer ses affirmations sur le rôle joué par TikTok dans les émeutes. Depuis cette décision, l’état d’urgence a été levé et l’accès au réseau rétabli.

Mais la décision du Conseil d’État, que nous avions sollicité dans la cadre d’un recours en référé-liberté, portait sur l’urgence à maintenir ou à suspendre la décision du gouvernement. C’est ce caractère d’urgence qui a été refusé, mais la décision ne portait pas sur le fond de la légalité ou de l’illégalité de l’action du gouvernement, pourtant condamnée sur le principe par les plus hautes cours européennes (CEDH) ou les instances internationales (Nations Unies). C’est pourquoi nous avons décidé de déposer un nouveau recours devant le Conseil d’État, pour l’obliger à statuer a posteriori sur la légalité de la coupure arbitraire d’une partie d’Internet par un gouvernement. L’enjeu n’a évidemment rien à voir avec TikTok, mais concerne directement le droit des habitant·es de l’Union européenne à ne pas être privé·es à l’avenir de leurs moyens de communication, du jour au lendemain, par un gouvernement livré à ses plus bas instincts répressifs.

Lire l’article : https://www.laquadrature.net/2024/06/05/blocage-de-tiktok-en-nouvelle-caledonie-retour-sur-un-fiasco-democratique/

Analyse du règlement IA

Le règlement européen sur l’Intelligence artificielle (IA Act) a été adopté le 21 mai dernier. Au début des négociations autour de ce texte en 2021, les intentions annoncées pouvaient laisser espérer qu’il encadrerait ou interdirait l’usage des techniques d’IA les plus attentatoires aux droits individuels et collectifs, comme la reconnaissance faciale, ou les algorithmes de contrôle policier, administratif et de « notation sociale ». Mais l’insistance des États membres, la France en tête, a eu raison de ces bonnes intentions.

Cette approche de l’IA comme « marché » et comme moyen de croissance économique réduit délibérément les garde-fous censés encadrer l’usage de l’IA pour la surveillance des populations, en créant de nombreuses exceptions par lesquelles l’industrie et les gouvernements pourront justifier les pires usages policiers. Une analyse détaillée à lire sur notre site.

Lire l’analyse du règlement IA : https://www.laquadrature.net/2024/05/22/le-reglement-ia-adopte-la-fuite-en-avant-techno-solutionniste-peut-se-poursuivre/

Loi contre les ingérences étrangères

Dans le contexte géopolitique que l’on connaît, le gouvernement a décidé de soutenir, par l’intermédiaire du député Sacha Houlié (Renaissance), une proposition de loi pour « Prévenir les ingérences étrangères en France ». Parmi les diverses dispositions envisagées, dont un contrôle serré des financements associatifs venus de l’étranger, il s’agit d’autoriser les services de renseignement à utiliser pour de nouvelles finalités les fameuses « boîtes noires » légalisées en 2015 par la loi Renseignement.

Ces « sondes » surveillent les réseaux de télécommunication (Internet et téléphonie) à la recherche de signaux susceptibles d’attirer l’attention des service de renseignement. Le loi de 2015 imposait quelques limites fragiles à cette surveillance de masse, en le limitant à la lutte antiterroriste, avec des obligations d’évaluation et de contrôle, mais avec une définition trop tolérante de ce qui est considéré comme du terrorisme, pouvant englober l’activisme écologique par exemple. La nouvelle proposition de loi viendrait encore élargir ce cadre, avec des champs mal définis comme « l’indépendance nationale » ou « les intérêts majeurs de la politique étrangère ».

L’Observatoire des Libertés et du Numérique (OLN), un collectif d’association de défense des libertés dont La Quadrature fait partie, a rédigé un communiqué pour dénoncer le risque que cette surveillance accrue fait peser sur nos libertés collectives. Nous signons et publions ce communiqué sur notre site.

Lire le communiqué de l’OLN : https://www.laquadrature.net/2024/05/30/proposition-de-loi-ingerences-etrangeres-une-nouvelle-etape-dans-lescalade-securitaire/

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