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Paris, le 3 août 2015 — Depuis le mois de janvier 2015, La Quadrature du Net, FDN et la Fédération FDN ont entamé une série de recours auprès du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel contre les lois et décrets d’application que ces associations considèrent liberticides. Afin d’aider les citoyens à suivre dans le temps les différentes étapes des procédures en cours, cette page explique en quelques lignes chacun des recours et son état d’avancement.
Sommaire
1. Décret non publié sur les activités de surveillance de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)">1. Décret non publié sur les activités de surveillance de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE)
Deux procédures parallèles ont été initiées contre ce décret dévoilé par un article de L’Obs de juillet 2015. Ce décret non publié et demeuré secret autorise la captation massive de communications par les services de renseignement extérieur des flux internet en provenance ou à destination du territoire français.
1.1. Référé suspension">1.1. Référé suspension
Statut : rejetée
Cette procédure d’urgence avait pour but de demander la suspension immédiate du décret en attendant le jugement sur le fond. Lire le recours.
Ce recours a été rejeté dans une ordonnance du 9 septembre 2015 signée de la main de Bernard Stirn, président de la section du contentieux du Conseil d’État, avant même la tenue d’une audience contradictoire. Dans cette décision très politique, le juge des référés estime que l’urgence n’est pas caractérisée.
1.2. Requête en annulation devant le Conseil d’État">1.2. Requête en annulation devant le Conseil d’État
Statut : en cours
Les points attaqués portent sur les éléments suivants :
- Légalité externe : Décret entaché d’incompétence et adopté au terme d’une procédure irrégulière ;
- Légalité interne : Décret dépourvu de base légale. La loi sur le renseignement adoptée en juillet 2015 aurait du apporter un fondement légal à ce décret, mais les dispositions relatives à la surveillance internationale ont été censurées par le Conseil constitutionnel.
Lire le recours
2. Décret sur la conservation et la communication des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création d’un contenu mis en ligne">2. Décret sur la conservation et la communication des données permettant d’identifier toute personne ayant contribué à la création d’un contenu mis en ligne
Statut : en cours
Suite à l’arrêt de la CJUE d’avril 2014 « Digital Rights » condamnant la rétention massive de données personnelles, LQDN, FDN et FFDN avaient soumis au Gouvernement le 6 mai 2015 une requête de demande gracieuse d’abrogation du décret n°2011-219 du 25 février 2011 et de l’article R. 10-13 du code des postes et communications électroniques (CPCE). Ces dispositions définissent les données à conserver par les Fournisseurs d’Accès à Internet (FAI), afin de permettre l’identification des personnes ayant contribué à la création de contenu mis en ligne et autorisent les opérateurs de communications électroniques à différer d’un an l’effacement de certaines données techniques relatives à leurs abonnés. L’absence de réponse du gouvernement dans un délais de deux mois constitue un refus implicite d’abroger ces dispositions, ce qui amène les trois associations à saisir directement le Conseil d’État. Les points attaqués portent sur l’inconventionnalité du régime de conservation généralisée et indifférenciée des « données techniques » et notamment :
- L’ingérence massive dans les droits fondamentaux, particulièrement le droit au respect de la vie privée ;
- L’impossible limitation au strict nécessaire de la rétention massive de données ;
Lire le recours.
3. Saisines parlementaires et procédure de la porte étroite sur la loi renseignement">3. Saisines parlementaires et procédure de la porte étroite sur la loi renseignement
Statut : terminé
La loi renseignement autorisant une collecte massive de données, un champ d’application très large, la mise à l’écart du juge judiciaire et un contrôle très faible par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, voire inexistant pour la surveillance internationale. Le Conseil constitutionnel a été amené à se prononcer sur un grand nombre de dispositions, via les trois saisines parlementaires et présidentielles :
Des organisations ont envoyé leurs propres observations via la procédure de la porte étroite. Voici les différents mémoires ou _amicus curiae_ que nous avons pu recenser :
4. Décret d’application de la Loi terrorisme sur le déréférencement des sites">4. Décret d’application de la Loi terrorisme sur le déréférencement des sites
Statut : en cours
Le décret d’application de la loi Terrorisme permettant le déréférencement des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique a été publié le 4 mars 2015. LQDN, FDN et FFDN ont déposé un recours en annulation devant le Conseil d’État fin avril 2015. Les points attaqués sont notamment :
- Légalité externe
- atteinte à la liberté de communication non prévue par la loi
- absence d’étude d’impact antérieure au décret
- Légalité interne
- le décret viole la séparation des pouvoirs
- le décret n’est ni clair, ni intelligible
- il existe des mesures alternatives au déréférencement plus proportionnées
- l’absence de contrôle juridictionnel viole les droits fondamentaux
- la loi et le décret ne réunissent pas les garanties suffisantes pour éviter les abus
- les voies de recours a posteriori sont ineffectives
- le contrôle des mesures par une personne qualifiée de la CNIL est ineffectif
Ce recours n’a pas été encore publié.
5. Décret d’application de la LOPPSI et de la Loi terrorisme sur le blocage administratif de sites Internet">5. Décret d’application de la LOPPSI et de la Loi terrorisme sur le blocage administratif de sites Internet
Deux procédures ont été initiées contre ce décret.
5.1. Recours devant le Conseil d’État">5.1. Recours devant le Conseil d’État
Statut : en cours
Le décret d’application de la LOPPSI et de la loi Terrorisme permettant le blocage administratif de sites Internet a été publié le 5 février 2015. LQDN, FDN et FFDN ont déposé un recours en annulation devant le Conseil d’État en avril 2015\. Ce recours attaque notamment :
- Légalité externe
- atteinte à la liberté de communication non prévue par la loi
- atteinte au secret des correspondances non prévue par la loi
- absence d’étude d’impact
- absence d’arrêté autorisant le traitement de données à caractère personnel par l’administration
- Légalité interne
- le décret viole la séparation des pouvoirs
- le décret n’est ni clair, ni intelligible
- le blocage de sites porte une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression
- l’absence de contrôle juridictionnel viole les droits fondamentaux
- l’interception des communications vers les sites bloqués est illégale
Voir les explications :
- sur le site de FDN
- sur le site de LQDN
Lire le recours déposé ainsi que le mémoire en intervention volontaire d’Article 19.
5.2. Demande de communication de la liste des adresses électroniques visée dans le décret n°2015-125 du 5 février 2015">5.2. Demande de communication de la liste des adresses électroniques visée dans le décret n°2015-125 du 5 février 2015
Statut : en cours
Il s’agit d’une procédure initiée par La Quadrature du Net seule. La liste des sites internet bloqués en application du décret n°2015-125 du 5 février 2015 n’est pas publique. La Quadrature du Net a par conséquent envoyé le 27 août 2015 une lettre à l’Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication (OCLCTIC) afin de demander la communication des adresses électroniques qui ont fait l’objet d’un blocage administratif. Lire la lettre envoyée.
6. Décret d’application de l’article 20 de la Loi de Programmation Militaire">6. Décret d’application de l’article 20 de la Loi de Programmation Militaire
L’article 20 de la Loi de Programmation Militaire (promulguée le 13 décembre 2013) prévoit un droit de communication élargi pour permettre aux administrations (notamment le ministère de la Défense, mais également le ministère de l’Intérieur ou Bercy) d’avoir un accès ouvert aux « informations » ou « documents » stockés chez les hébergeurs ou transitant par les opérateurs télécoms ou les fournisseurs d’accès à Internet (FAI). Les finalités nécessaires à cette communication sont larges et souvent imprécises (« sécurité nationale », « prévention du terrorisme », « sauvegarde des éléments essentiels du potentiel économique et scientifique de la France » etc.). Deux procédures ont été initiées contre ce décret.
6.1. Recours devant le Conseil d’État">6.1. Recours devant le Conseil d’État
Statut : en cours
Le décret d’application, publié le 26 décembre 2014, est attaqué par LQDN, FDN et FFDN devant le Conseil d’État pour les raisons suivantes :
- Légalité externe
- le décret ne précise pas le bon article de la loi. Le décret doit préciser un article de loi qui n’a pas prévu de décret d’application. Il n’a donc pas compétence pour le faire
- il n’a pas été présenté à la Commission européenne
- il n’a pas fait l’objet d’une étude d’impact
- Légalité interne
- le décret contredit la décision de la CJUE d’avril 2014 sur la rétention des données
- selon la jurisprudence de la CEDH, une intrusion dans la vie privée ne peut être mise en place que par une loi, et non par un décret
- le décret élargit le champ prévu par la loi en autorisant la collecte des données de personnes ne posant pas de contenu sur Internet
- le décret prévoit une collecte trop vaste, qui contrevient à la nécessité de rester « nécessaire et proportionné »
- le décret ne prévoit aucune procédure de suivi
Voir les explications :
- sur le site de LQDN
- sur le blog de FDN
Et lire le recours déposé.
6.2. Question prioritaire de constitutionnalité (QPC)">6.2. Question prioritaire de constitutionnalité (QPC)
Statut : terminé
Le 15 avril, les trois associations ont déposé devant le Conseil d’État une question prioritaire de constitutionnalité concernant le même décret d’application. Cette QPC soulève plusieurs points :
- atteintes à la vie privée et notamment au secret professionnel, comme le secret des échanges entre avocats et clients
- atteintes à la liberté d’expression et notamment au secret des sources des journalistes
- flou sur la définition de « informations et documents »
- flou sur la définition de « sur sollicitation du réseau »
Voir les explications sur le blog de FDN. Le 5 juin, le Conseil d’État a décidé de transmettre cette QPC au Conseil constitutionnel, jugeant que les questions soulevées étaient bien « nouvelles » et sérieuses. Voir sur le site de LQDN. Le Conseil constitutionnel a alors trois mois pour statuer sur cette question et déclarer si le décret d’application est conforme ou non à la Constitution française. Il a publié sa [www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2015/2015478qpc.htm décision] le 24 juillet 2015, rejetant l’ensemble de la QPC. Voir la réaction de LQDN (mise à jour). Lire le texte de la QPC et le mémoire complémentaire.