Nous venons de déposer un nouveau recours devant le tribunal administratif de Paris, en urgence, pour que la préfecture de police cesse sa surveillance par drones des manifestations. Alors que le Conseil d’État était clair en mai dernier et déclarait illégale l’utilisation des drones par la police parisienne, celle-ci fait depuis mine de ne rien voir et continue aujourd’hui de déployer, à chaque manifestation, son arsenal de surveillance par drones. Il est temps d’y mettre fin, à nouveau.
En mai dernier, le Conseil d’État donnait raison à La Quadrature du Net en estimant que la surveillance par drones est interdite pour faire respecter les mesures restrictives du confinement. Bien au-delà de cas particuliers, ce sont des principes forts, s’appuyant sur un raisonnement général en matière de droit à la vie privée et de droit à la protection des données personnelles, qui ont été dégagés. Le Conseil d’État a ainsi estimé que l’usage de drones porte une atteinte particulière aux droits et libertés et que, en l’absence d’encadrement réglementaire, leur usage reste interdit.
Cette décision de justice n’a nullement gêné la préfecture de police. Grâce à
Pourtant, la surveillance des manifestations est d’autant plus grave qu’il s’agit de moments d’expressions politiques. Comme nous l’analysions en 2019, la surveillance des manifestant·es à l’aide de technologies de reconnaissance faciale est également aujourd’hui déjà possible, depuis 2012. Le gouvernement, par la voix du ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, ne se cache d’ailleurs pas que l’objectif de ces drones n’est pas seulement le maintien de l’ordre, mais bel et bien, in fine, d’identifier les personnes qui manifestent. Et le récent « Schéma national du maintien de l’ordre » ne fait que le confirmer.
Notre premier recours contre les drones avait été rendu possible grâce à un article de Mediapart dans lequel la préfecture de police détaillait fièrement son usage des drones. Depuis, cette dernière refuse systématiquement de répondre aux journalistes. Ce silence en dit long sur le malaise du côté de la police qui sait que son activité de surveillance est aujourd’hui purement illégale.
Il est important de relever un autre silence : celui de la CNIL. L’autorité affirmait pourtant en mai, pour sauver les apparences, s’intéresser à la question des drones alors que le Conseil d’État constatait déjà leur illégalité. Aujourd’hui, plus de cinq mois après ce commentaire, rien ne semble bouger du côté de l’autorité chargée de faire respecter le droit en matière de vie privée…
En parallèle, la détermination politique de renforcer le pouvoir de la police est plus que jamais présente : la récente proposition de loi « relative à la sécurité globale » prévoit déjà d’autoriser, de façon extrêmement large, les drones pour surveiller les manifestations et identifier les manifestant·es. Nous reviendrons dessus bientôt, mais espérons déjà qu’une nouvelle victoire devant les juges permettra de freiner le blanc-seing que le groupe LREM à l’Assemblée nationale veut donner à la police, et mettra fin à l’utilisation de ce dispositif de surveillance de masse.