La semaine dernière, on a appris que la justice américaine, au terme d’une longue procédure, avait finalement donné tort à la société Warner qui revendiquait un droit d’auteur sur la chanson « Happy Birthday ». Son titre de propriété était en réalité sans valeur, alors qu’il fut utilisé depuis les années 80 pour empocher chaque année plusieurs millions de dollars en royalties et entraver la libre réutilisation de cet air datant de la fin du XIXe siècle ! […]
Pour lutter contre ces dérives, la loi numérique préparée par les services d’Axelle Lemaire prévoit de consacrer une nouvelle notion dans le droit français – celle de « domaine commun informationnel » – pour affirmer que certaines ressources ne doivent plus faire l’objet d’un droit exclusif entravant leur utilisation. […]
Par ailleurs, même pour les aspects qu’elle traite encore, la loi laisse subsister de nombreuses failles qui pourraient offrir prise à des pratiques de réappropriation abusive. Elle conserve notamment une manière négative de définir les choses communes, comme tout ce qui n’est pas protégé « par un droit spécifique, tel qu’un droit de propriété ou une obligation contractuelle ou extracontractuelle ».
Avec une telle approche, les conditions d’utilisation d’un site internet suffiraient à entraver l’usage de n’importe quel élément du domaine commun informationnel. L’objectif principal est donc complètement manqué ! Et par le jeu des renvois entre textes, le projet de loi laisse en réalité subsister de larges marges de manœuvre pour que les établissements culturels continuent à limiter la diffusion des reproductions fidèles des œuvres anciennes et à tarifer leurs usages. En l’état, le texte risque donc d’aboutir à une véritable légalisation du « copyfraud », beaucoup plus qu’il ne l’empêchera… […]
http://rue89.nouvelobs.com/rue89-culture/2015/09/29/loi-numerique-proteger-les-communs-trompe-loeil-261424