Paris, 10 mars 2011 – Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision1http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2011/2011-625-dc/decision-n-2011-625-dc-du-10-mars-2011.94924.html relative à la loi LOPPSI. Les sages ont estimé que l’article 4 de la loi, qui met en place la censure administrative du Net au prétexte de lutte contre la pédopornographie, n’était pas contraire à la Constitution. Le Conseil constitutionnel n’a pas su protéger les libertés fondamentales sur Internet, au premier rang desquelles la liberté d’expression. L’espoir réside désormais dans les instances européennes, seules à même d’interdire ou à défaut d’encadrer la censure administrative du Net et ses risques de dangereuses dérives.
La LOPPSI empilait des mesures liberticides portant sur les sujets les plus divers. Le Conseil constitutionnel s’est trouvé pris au piège de cette stratégie : il a certes censuré des dispositions à peine imaginables tant elles portaient atteinte aux droits directs des individus. Mais il a laissé passer des mesures plus discrètes ou habillées d’objectifs nobles, dont l’impact sur les libertés est très grave, notamment celles qui concernent Internet.
L’article 4 de la LOPPSI a pour conséquence directe de doter l’exécutif d’un pouvoir de suppression des informations circulant sur Internet. De manière totalement hypocrite, le gouvernement prétend lutter contre la pédopornographie, objectif pour lequel le filtrage est à la fois inefficace et totalement disproportionné, notamment en raison du risque de censure collatérale de sites parfaitement licites2Voir notre mémoire envoyé au Conseil constitutionnel : http://www.laquadrature.net/fr/loppsi-les-sages-devraient-censurer-la-censure-du-net
Voir aussi la position de l’Ange Bleu, association d’information et de prévention de la pédophilie : http://www.ange-bleu.com/article.php?type=actualites&origine=juriactu&id=113. Le risque est grand de voir un tel dispositif étendu à d’autres domaines.
« Cette décision sur l’article 4 est une grande déception. Il est évident que la censure d’Internet ne résoudra rien à la pédopornographie, comme en témoignent les expériences menées à l’étranger3Voir la lettre envoyée par les fournisseurs d’accès et l’association de prévention de la pédophilie néerlandais : https://www.bof.nl/2011/03/07/dutch-providers-abandon-ineffective-web-blocking/ De même, l’Allemagne a renoncé au filtrage, son efficacité ne pouvant être démontrée: http://www.laquadrature.net/fr/loppsi-comment-lallemagne-a-renonce-a-la-censure-du-net. Après les mesures de suspension de l’accès à Internet de la loi HADOPI, les appels à l’interdiction de l’hébergement de WikiLeaks et les discours contraires à la neutralité du Net, la France glisse un peu plus dans le camp des pays hostiles à l’Internet libre en instaurant la censure administrative du Net », déclare Jérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net.
« Il est regrettable que le Conseil constitutionnel n’ait pas approfondi sa jurisprudence HADOPI en consacrant le rôle de l’autorité judiciaire pour contrôler toute restriction à la liberté de communication sur Internet. Il se pourrait cependant que la solution vienne de l’Europe : le Parlement européen cherche en effet à encadrer strictement les mesures de filtrage mises en œuvre au niveau national, ce qui pourrait faire obstacle à l’application de l’article 4 de la LOPPSI4Voir analyse d’un récent vote au Parlement européen. Adresse : http://www.laquadrature.net/fr/encadrement-du-filtrage-le-parlement-europeen-doit-tenir-bon. D’autre part, le filtrage administratif du Net semble contraire à la Convention européenne des droits de l’Homme5Voir notre note « Le filtrage du Net viole l’État de droit ». Adresse : http://www.laquadrature.net/fr/le-filtrage-dinternet-viole-letat-de-droit, et on peut s’attendre à un recours dans ce sens. » conclut Félix Tréguer, chargé des affaires juridiques et institutionnelles de l’organisation citoyenne.
References
↑1 | http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2011/2011-625-dc/decision-n-2011-625-dc-du-10-mars-2011.94924.html |
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↑2 | Voir notre mémoire envoyé au Conseil constitutionnel : http://www.laquadrature.net/fr/loppsi-les-sages-devraient-censurer-la-censure-du-net Voir aussi la position de l’Ange Bleu, association d’information et de prévention de la pédophilie : http://www.ange-bleu.com/article.php?type=actualites&origine=juriactu&id=113 |
↑3 | Voir la lettre envoyée par les fournisseurs d’accès et l’association de prévention de la pédophilie néerlandais : https://www.bof.nl/2011/03/07/dutch-providers-abandon-ineffective-web-blocking/ De même, l’Allemagne a renoncé au filtrage, son efficacité ne pouvant être démontrée: http://www.laquadrature.net/fr/loppsi-comment-lallemagne-a-renonce-a-la-censure-du-net |
↑4 | Voir analyse d’un récent vote au Parlement européen. Adresse : http://www.laquadrature.net/fr/encadrement-du-filtrage-le-parlement-europeen-doit-tenir-bon |
↑5 | Voir notre note « Le filtrage du Net viole l’État de droit ». Adresse : http://www.laquadrature.net/fr/le-filtrage-dinternet-viole-letat-de-droit |