Appelons les députés pour rejeter la loi « haine »

Le 21 janvier 2020, l’Assemblée nationale examinera la proposition de loi « contre la haine ». Il est urgent que nous appelions l’ensemble des députés pour leur demander de rejeter ce texte.

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Avec la loi « haine », l’ensemble des sites Web devront censurer en 1h les contenus que la police leur signalera comme relevant du terrorisme ou de l’abus d’enfant. Si un site ne censure pas un contenu signalé (par exemple car le signalement est fait en week-end ou pendant la nuit), la police pourra obtenir son blocage par les fournisseurs d’accès à Internet. Cette procédure se déroulant sans l’intervention d’un juge, les risques d’abus par la police sont considérables.

Par ailleurs, les grandes plateformes devront aussi censurer en 24h les contenus « manifestement illicites » qui leur seront signalés, sous peine de sanctions allant jusqu’à 4% de leur chiffre d’affaire.

  1. Ce délai implique une censure automatisée par des algorithmes, qui conduit dès aujourd’hui à la censure de propos légitimes tout en violant le RGPD1L’article 22 du RGPD interdit les décisions individuelles fondées sur le traitement automatisé de données personnelles, ce qu’implique tout outil de censure automatisée..
  2. Cette censure contourne le juge, transférant le pouvoir de la justice à une poignée d’entreprises.
  3. Cette censure pourra être facilement instrumentalisée par le gouvernement pour censurer ses adversaires politiques (tel qu’il le fait déjà, lire notre analyse).
  4. Cette nouvelle censure est vaine car les grandes plateformes sont déjà bien trop grande pour que la haine puisse y être modérée, comme elles le démontrent systématiquement2Facebook a expliqué que la vidéo de la tuerie de Christchurch a été dupliquée 1,5 millions de fois sur sa plateforme dans les 24h suivant l’attentat, au cour desquelles 300 000 copies auraient entièrement échappé à ses outils de modération automatisés. Cet événement a démontré l’incapacité structurelle des outils de modération automatisés à faire face en 24h aux menaces, même les plus graves. – la solution est ailleurs.
  5. Plus grave, ce délai de 24h est contre-productif car les plateformes ne pourront plus prioriser leurs actions contre les contenus les plus graves, étant obligées d’examiner dans la même urgence les contenus les moins graves.

D’autre part, la loi confie les pleins pouvoirs au CSA. Il décidera seul et sans débat démocratique des règles à imposer aux grandes plateformes. Il choisira seul quelles plateformes sanctionner, pour quels motifs et à quels montants. Un autre risque de dévoiement de la censure à des fins politiques.

Enfin, la censure imposée par cette nouvelle loi risque de conduire à l’identification massive des personnes accédant à des contenus pornographiques, sous le prétexte de protéger les mineurs – alors que les enfants doivent être protégés par des humains et non par des machines. Sera aussi censurée l’assistance et l’intermédiation entre travailleuses du sexe, qui seront chassées du Web et exposées à davantage de violence dans la rue.

Mais alors, faut-il ne rien faire contre la haine ?

Certainement pas. Au contraire, c’est un sujet à prendre avec gravité et non par « affichage », tel que le fait cette loi qui ne propose rien de sérieux mais risque uniquement d’empirer la situation. Contre la haine, la solution est humaine, culturelle, et ne sera jamais le résultat magique des intelligences artificielles fantasmées par Facebook et Google. En attendant ces changements culturels, nous demandons au législateur qu’il force les grandes plateformes à devenir interopérables : leur taille immense et leur économie de l’attention sont des causes importantes du problème. Il est urgent de pouvoir nous en libérer.

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1 L’article 22 du RGPD interdit les décisions individuelles fondées sur le traitement automatisé de données personnelles, ce qu’implique tout outil de censure automatisée.
2 Facebook a expliqué que la vidéo de la tuerie de Christchurch a été dupliquée 1,5 millions de fois sur sa plateforme dans les 24h suivant l’attentat, au cour desquelles 300 000 copies auraient entièrement échappé à ses outils de modération automatisés. Cet événement a démontré l’incapacité structurelle des outils de modération automatisés à faire face en 24h aux menaces, même les plus graves.