Paris, le 21 janvier 2015 — Après les attentats des 7 et 9 janvier, le premier ministre Manuel Valls a annoncé ce matin une série de mesures pour « lutter contre le terrorisme ». Devant ce discours évoquant longuement une augmentation du renseignement et de la surveillance, La Quadrature du Net rappelle que nombre d’annonces récentes préparent un nouveau recul des libertés publiques sur Internet et appelle à la plus grande vigilance politique et citoyenne sur les mesures qui seront mises en œuvre.
Manuel Valls croit rassurer lorsqu’il affirme vouloir mieux encadrer la surveillance des communications, ou lorsqu’il appelle à des mesures exceptionnelles en les distinguant de l’état d’exception. Mais ces effets rhétoriques ne peuvent masquer la réalité d’un pouvoir qui cherche à contourner toute forme de contrôle et instrumentalise les attentats pour achever la mise en place d’une des législations les plus répressives qui soient1Voir la comparaison du cadre juridique existant en France avec le Patriot Act appliqué aux États-Unis : http://blogs.lexpress.fr/passe-droits/patriot-act/.
Alors que les condamnations absurdes et d’une sévérité extrême se multiplient au nom de la lutte contre l’apologie du terrorisme ; alors que le gouvernement ne cesse d’appeler à l’accentuation de la régulation extra-judiciaire de la liberté d’expression en faisant pression sur les acteurs du Web au nom d’une responsabilité « morale » dans la propagation des discours d’embrigadements radicaux ; alors que le Conseil de l’Union européenne s’apprête à remettre en cause la confidentialité et le chiffrement des communications2Voir les propositions du coordinateur européen de la lutte contre le terrorisme dans sa note préparatoire en date du 17 janvier : « Since the Snowden revelations, internet and telecommunications companies have started to use often de-centralized encryption which increasingly makes lawful interception by the relevant national authorities technically difficult or even impossible. The Commission should be invited to explore rules obliging internet and telecommunications companies operating in the EU to provide under certain conditions as set out in the relevant national laws and in full compliance with fundamental rights access of the relevant national authorities to communications (i.e. share encryption keys). » ; alors même que le rôle d’Internet dans la radicalisation des tueurs de Charlie Hebdo et de l’HyperCacher est contredit par les faits, c’est clairement un nouveau recul des libertés publiques qui s’annonce.
« Comme l’a illustré l’an dernier le passage en force de la loi de programmation militaire et la dernière loi contre le terrorisme, la légalité n’est pas en soi une garantie suffisante : elle permet souvent de légitimer des entorses inacceptables aux droits fondamentaux. La future loi sur le renseignement devra dès lors être irréprochable sur le contrôle et le périmètre de la surveillance des communications, avec un véritable dispositif de défense des libertés individuelles et publiques. Les citoyens doivent demeurer vigilants pour faire en sorte que l’attachement aux libertés et à la tolérance exprimés lors des marches du 11 janvier dernier ne servent pas de caution à un énième tour de vis sécuritaire », déclare Benjamin Sonntag, cofondateur de La Quadrature du Net.
References
↑1 | Voir la comparaison du cadre juridique existant en France avec le Patriot Act appliqué aux États-Unis : http://blogs.lexpress.fr/passe-droits/patriot-act/ |
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↑2 | Voir les propositions du coordinateur européen de la lutte contre le terrorisme dans sa note préparatoire en date du 17 janvier : « Since the Snowden revelations, internet and telecommunications companies have started to use often de-centralized encryption which increasingly makes lawful interception by the relevant national authorities technically difficult or even impossible. The Commission should be invited to explore rules obliging internet and telecommunications companies operating in the EU to provide under certain conditions as set out in the relevant national laws and in full compliance with fundamental rights access of the relevant national authorities to communications (i.e. share encryption keys). » |